Gérer la pauvreté – qui a décidé du Plan? – Jean-Claude Basque

Ce texte est le premier d’une série de trois portant sur la Loi sur l’inclusion économique et sociale adoptée par Shawn Graham en 2010. Les deux autres textes seront publiés dans les semaines à venir.

 

À l’approche du 17 octobre, Journée mondiale du refus de la misère, reconnue Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté par les des Nations Unies, il me semble important de faire un retour sur ce qui se passe au Nouveau-Brunswick depuis 2008 en ce qui a trait à la réduction de la pauvreté.

En 2008, suite à des pressions de plusieurs organismes de la société civile, entre autres le Front commun pour la justice sociale, le gouvernement libéral de Shawn Graham décida de s’occuper de la question de la pauvreté.

Selon les documents gouvernementaux de l’époque (qui étaient basés sur le recensement de 2006), vivre en situation de pauvreté était la réalité d’une personne sur sept, soit 100 740 citoyennes et citoyens de la province. Ceux-ci se trouvaient majoritairement parmi les travailleuses et travailleurs à faible salaire, dont ceux au salaire minimum qui gagnaient 7,75 $ par heure, les quelques 40 000 personnes dépendant du bien-être social, dont le revenu total était parmi les plus bas de toutes les provinces canadiennes et les aînés dont 10,9 % vivaient dans la pauvreté. Sur les 217 790 familles du Nouveau-Brunswick, 16 116 (7,4 %) avaient un revenu annuel inférieur à 20 000 $.

 Le 17 octobre 2008, la ministre du Développement social Mary Shryer profita du Sommet sur la pauvreté, organisé par le Front commun pour la justice sociale, pour annoncer son intention de doter la province d’un plan de réduction de la pauvreté. Conseillée par James Hughes, sous-ministre au ministère du Développement social de l’époque et anciennement directeur général du Old Brewery Mission de Montréal, la ministre Shryer décida que la meilleure manière de combattre la pauvreté était d’inclure différentes composantes de la société dans l’élaboration de son plan. Pour coprésider son initiative, elle fit appel à deux personnes connues, Gerry Pond, homme d’affaires de Saint-Jean, et Léo-Paul Pinet, directeur général du Centre de bénévolat de la Péninsule acadienne. Afin de donner un aspect populaire à son initiative, elle élabora un plan de consultation en trois phases.

La première phase, celle de la consultation publique, s’est déroulée entre octobre 2008 et mars 2009. Des séances de dialogues ont été organisées dans seize municipalités de la province. Elles étaient ouvertes au public, mais fermées aux médias. Ces séances se limitaient à regrouper les participants en tables rondes. Ceux-ci ne devaient pas débattre des idées soulevées, mais plutôt faire des suggestions ou des commentaires et en prioriser entre trois et quatre pour le rapport aux autres participants. Aucun temps n’était prévu pour l’échange ou la discussion en plénière. Un rapport intitulé, «Un chœur de voix – le rapport de ce qui s’est dit», a été publié en juin 2009 et reprenait les idées et les propositions des participants. Outre la possibilité pour le public de faire connaître ses opinions sur le site web du gouvernement, cette première phase a été la seule et unique occasion pour le public de participer à l’élaboration du plan de réduction de la pauvreté de la province.

La deuxième phase était celle du choix des options à envisager. Elle a eu lieu entre juin et septembre 2009 et a permis à trente personnes choisies par le gouvernement de se réunir trois fois à Fredericton pour analyser le rapport, «Un chœur de voix». L’objectif de ces rencontres était de proposer au gouvernement des options pour le futur plan de réduction de la pauvreté. Ce rapport n’a jamais été rendu public même si plus d’une vingtaine d’organisations de la société civile l’ont demandé dans une lettre ouverte.

La troisième et dernière phase était celle du Forum final qui s’est tenu les 12 et 13 novembre 2009, à Saint-Jean. Quarante-sept personnes, encore une fois triées sur le volet par le gouvernement, ont pris un peu moins de 10 heures pour s’entendre sur une proposition d’un plan provincial de lutte contre la pauvreté. Porté par leur enthousiasme, les participants se sont entendus sur trois objectifs ambitieux à atteindre dans cinq ans : réduire la pauvreté monétaire de 25%, réduire la pauvreté monétaire extrême de 50% et faire d’importants progrès en vue d’atteindre une inclusion économique et sociale soutenue.

En février 2010, le gouvernement libéral de Shawn Graham, appuyé par l’opposition officielle de David Alward, adoptait la Loi sur l’inclusion économique et sociale. Ce plan prévoyait la mise sur pied d’une nouvelle société de la couronne, la Société de l’inclusion économique et sociale, ainsi qu’un certain nombre de réseaux d’inclusion communautaire. Diverses organisations, dont le Front commun pour la justice sociale, ont été très critiques à l’égard de ces deux structures.

 

jean claude basqueJean-Claude Basque est originaire de Tracadie, mais demeure à Moncton depuis 1996. Pendant plus de quarante années, il fût impliqué dans des causes sociales et syndicales. Depuis sa retraite, il est le coordonnateur provincial bénévole du Front commun pour la justice sociale du Nouveau-Brunswick.

6 réponses à “Gérer la pauvreté – qui a décidé du Plan? – Jean-Claude Basque

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  4. Personnellement je n`ai rien vu de concluant jusqu`à date. Je crois qu`il est temps d`agir et d`arrêter de mettre des tentatives de solutions sur papier.

  5. Bravo et contente de savoir que d’autres chroniques viendront compléter celui-ci.
    J’ai toujours été outragée qu’aucun regroupement de défense des droits des femmes n’était pas à la table de travail de ce « plan ».
    Je note également qu’on ne devrait pas continuer de prétendre que le résultat de cet exercice chorégraphié des gouvts est un plan. C’est une liste. Un plan prévoierait comment le projet sera exécuté pour atteindre les buts, pour faire disparaître les causes…

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