Lors de chaque élection, le pourcentage de femmes parmi les candidats et les élus intéresse les médias et le public. C’est une bonne chose, mais…
Il m’arrive de fêter quand il y a peu de femmes candidates ou élues.
Dans le cadre des élections au Nouveau-Brunswick le mois dernier, seulement 30%des candidats du parti anti-francophone et anti-bilinguisme, People’s Alliance, étaient des femmes. Au moins y’a ça, me suis-je dit.
Il m’arrive d’être déçue lorsque des femmes sont élues.
Lorsque les Marine Le Pen ou les Margaret Thatcher de ce monde sont élues, je me dis, parce que vaut mieux être polie des fois, c’est une bonne journée pour ces femmes et je défends leur droit de se présenter.
Il m’arrive de ne pas être attristée par un recul dans le taux de représentation femme-homme.
Lorsque vient une vague d’élections de gouvernements de droite, d’extrême-droite ou même fasciste, souvent le taux de représentation de femmes élues chute. Disons que la parité n’est pas ma préoccupation principale à ces moments-là.
Il y a élire davantage de femmes et il y a politique féministe. On peut dire que c’est une distinction qui ne devrait pas exister, mais elle est réelle parce que le patriarcat, la socialisation au patriarcat et la misogynie sont réelles, ainsi que les partis politiques, leur boys club et leurs méthodes oppressantes.
Si je dois choisir entre voter pour une femme ou voter pour un programme féministe, je penche pour le programme féministe sans aucun pincement au cœur, avec un «V’là !» joyeux même.
La lutte féministe n’a jamais été qu’une lutte pour entrer dans l’arène politique. C’est une lutte pour radorcer le monde.
Les dernières élections au Canada ont continué l’élan vers un plus grand nombre de femmes dans les assemblées provinciales et fédéral. Mais 100 ans après l’obtention du droit de vote des femmes, ce n’est point la parité.
Seulement 27% des députés de la Chambre des communes canadienne sont des femmes, un taux record.
Depuis peu, le Québec détient la palme au Canada avec 42% de femmes, suivi de l’Ontario et la Colombie-Britannique avec 39%. Dans deux autres provinces, les femmes composent plus du tiers de leur Assemblée.
Suite aux récentes élections, le Nouveau-Brunswick n’a pas bougé de son avant-dernière place, devant l’Île-du-Prince-Édouard (qui dépassera probablement le Nouveau-Brunswick lors des élections provinciales en 2019 puisqu’il est prévu que le Parti vert y fera de grands gains, ce qui veut dire de nombreuses candidates).
Et pourtant, le Nouveau-Brunswick a élu un nombre record de femmes en 2018. 11 femmes, qui seront 22% de notre Assemblée.
Point impressionnant, mais au moins c’est une augmentation, ce qui n’est pas toujours le cas après chaque élections récemment. La représentation féminine tergiverse entre tragique et pathétique depuis des décennies.
En 2018, les partis politiques du Nouveau-Brunswick étaient incités à choisir des femmes candidates par une mesure nouvellement adoptée qui prévoit une augmentation à leurs versements annuels selon le nombre de votes obtenus par une candidate, comparativement à un candidat. Un vote pour une femme compte pour 1,5 fois le taux payé pour les votes que les partis politiques ont obtenus pour les hommes, ce qui devait les encourager à nommer des femmes candidates et à les nommer dans des circonscriptions gagnables. Mais à part le Parti vert et le NPD (qui n’a eu aucun élu-e cette fois), les autres partis n’ont pas approché la parité.
Comme Radio-Canada Acadie a eu l’esprit de dire, «Le Parti libéral et le Parti progressiste-conservateur n’ont pas atteint la parité au sein de leurs troupes. Qu’importe, ils sont satisfaits de leurs résultats.»
Les libéraux ont eu 7 occasions de nommer une femme dans une circonscription où le député sortant ne se représentait pas. Ils ont choisi 6 hommes et une femme dans ces circonscriptions prisées. Les progressistes-conservateurs ont eu trois occasions semblables, et ont nommé deux hommes et une femme.
Ce n’est pas là l’engagement qu’il faut pour changer le portrait. Ces partis aiment la politique entre même sexe, semble-t-il.
Le Nouveau-Brunswick est la seule province où les femmes ont obtenu le droit d’être candidates bien plus tard que le droit de voter. En 1919, nous avons obtenu le droit de voter pour des hommes. 16 ans plus tard, en 1935, nous avons obtenu le droit de nous présenter comme candidates. Je dirais qu’on essaie toujours de ne pas se distinguer.
Donc, au Nouveau-Brunswick, le groupe qui compose 49% de la population et qui détient en plus les rênes économiques, aura 78% des sièges de l’Assemblée.
Même les sondages et les groupes de réflexion ne seraient pas valides s’ils se souciaient si peu de leur composition. Mais la démocratie, évidemment, se pratique n’importe comment.
Et après tout ça, on n’a ni un bon nombre de femmes dans l’Assemblée, ni politique féministe.
À propos…
Rosella Melanson est Acadienne, blogueuse et activiste. Elle a une formation en travail social, en journalisme et en technologie de l’information. Elle a surtout été à l’emploi du Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick. À la retraite, elle voyage et écrit, et quand elle est au Nouveau-Brunswick, elle est commentatrice politique.
Merci, Paulette. Belle expression, reconduire à la table de dessins.
Belle réflexion ma chère Rosella….il faut toujours nous reconduire à la table de dessins. Restons vigilantes!