Pourquoi Trump? Une perspective louisianaise – Brian Gabriel Comeaux

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Les articles de La Filière Louisiane sont publiés grâce à un partenariat entre Astheure et Les Carnets Nord/Sud, blogue de la Chaire de recherche du Canada en études acadiennes et transnationales (CRÉAcT) de l’Université Sainte-Anne. Cette série vise à faire mieux connaître les enjeux culturels de la Louisiane francophone et à favoriser le dialogue entre Acadiens et Louisianais.

Je suis arrivé de bonne heure le matin du mardi 8 novembre pour constater que la queue serpentait déjà hors de la cantine de l’école primaire qui nous sert de lieu de scrutin dans le petit village de Duson sur la prairie cadienne, à huit kilomètres à peine de Lafayette. La file était composée majoritairement, mais pas totalement, de citoyens blancs de la classe ouvrière – des « habitants » comme on les appelle en Louisiane : des récolteurs de riz et d’écrevisses, de fèves de soja et de canne à sucre. On y trouvait aussi des caissières de dépanneurs et de supermarchés, des serveuses de petits restaurants, et aussi des soudeurs, des foreurs, des « roughnecks » et des machinistes qui forment la base de l’industrie pétrolière en Louisiane.

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Résultats du scrutin présidentiel du 8 novembre 2016 dans chaque paroisse (comté) de la Louisiane. En rouge, les résultats de Trump et en bleu, les résultats de Clinton.

Cette boîte, le numéro 28 dans la paroisse de Lafayette, a donné 84% de ses votes à Donald Trump contre 13% pour Hillary Clinton. Gary Johnson, le candidat des libertariens, et Jill Stein du Parti vert se sont partagé 3% des voix. En 1992, les résultats du 28e arrondissement étaient nettement différents. Bill Clinton avait pris 44% contre 38% pour George Bush, père, et 18% pour le candidat indépendant, Ross Perot. Ça fait tout un écart entre Clinton-époux et Clinton-épouse!

Derrière moi, j’entendais la conversation entre un jeune Créole noir et un jeune Cadien en queue avec sa conjointe. Les trois parlaient des difficultés de l’industrie pétrolière. Il y avait déjà un an et demi que l’un d’entre eux était au chômage alors que l’autre venait de décrocher un nouvel emploi sur un puits de forage – mais il a fait certain de préciser qu’il gagnait une piastre de l’heure de moins avec son nouveau job. Sa conjointe a ajouté que, après avoir perdu son emploi de bureau en 2015, elle était obligée de garder les enfants des voisins chez elle pendant leurs heures de travail pour mettre quelques sous dans ses poches.

Si nous voulons croire les statisticiens, le jeune homme noir, une fois rentré dans la cantine, aurait voté pour Hillary Clinton, tandis que le jeune Cadien et la jeune Cadienne seraient rentrés pour voter pour Donald Trump. Je reconnais l’ironie sans pouvoir l’expliquer.

Mon premier vote pour un président, c’était en 1980, pour Ronald Reagan. Le président Reagan était connu pour son conservatisme, bien sûr mais aussi pour son caractère jovial empreint d’optimisme. C’est peut-être difficile à croire aujourd’hui, mais à l’Université de l’État de Louisiane (LSU) où j’étais étudiant pendant la majorité de son mandat, Reagan était pour nous un demi-dieu. On lisait Russell Kirk, Ludwig Von Mises, et Eric Voegelin comme les bohémiens dévoraient Sartre dans les cafés de Paris. Jean-Paul II nous a poussés vers Thomas d’Aquin. La principale idée qui m’en reste, c’est que le progrès social ne peut être réalisé qu’à partir des hauteurs des épaules des géants qui nous ont précédés.

Reagan avait aussi le don de toucher les émotions. Son expression de condoléances nationales le soir du désastre de la navette spatiale Challenger et son discours pour le 40e anniversaire du Jour-J restent gravés dans ma mémoire.

Donald Trump a éclaté sur la scène politique comme un ouragan : bruyant et grossier. Spontanément, il me dégoûtait et c’est peu de dire que Trump n’était pas mon premier choix pour la nomination du Parti républicain. En même temps, j’ai compris pourquoi il attirait tant de soutien. Pendant trop longtemps, le gouvernement et les politiciens se sont occupés de protéger leurs intérêts au lieu de travailler pour les intérêts communs des citoyens, et l’électorat en a eu assez. Mais en même temps, Donald Trump restait assez éloigné d’Eric Voegelin et de Thomas d’Aquin.

Pour sa part, Hillary Clinton présentait une campagne alourdie par des qualités extrêmement démodées au vu des exigences de cette saison politique, dont, en partie, le copinage corporatiste et ses allures politiquement correctes étouffantes. Ce n’était pas le moment idéal pour une candidate qui traînait devant le public les bagages de 25 ans. Chacune de ses fautes a été exagérée sous cette lumière, et, au bout du compte, elle n’a pas pu surmonter ces problèmes.

Il reste à voir ce que le président Trump fera de son mandat. Au pire, il sombrera dans le fond de son caractère en tombant dans le piège de la mesquinerie et des petites vengeances. Au mieux, il ouvrira une fenêtre réformiste pour restaurer aux Américains la confiance dans leur gouvernement.

Nous verrons.

À propos…

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Brian Gabriel Comeaux est diplômé en sciences politiques et en droit de la Louisiana State University à Bâton-Rouge. Il travaille comme conseiller juridique dans l’industrie pétrolière. Directeur-général du Congrès mondial acadien-Louisiane 1999, il habite le Marais-des-oies dans la paroisse de Lafayette en Louisiane.

2 réponses à “Pourquoi Trump? Une perspective louisianaise – Brian Gabriel Comeaux

  1. Pingback: Pourquoi Trump ? Une perspective louisianaise (Brian Gabriel Comeaux) – Les Carnets Nord/Sud·

  2. Lecture complètement inutile. ça sert à quoi un « article » du genre? dire « on est de droite »? ok, ça on le sait, on espère que ça va marcher pour vous. est-ce que ça explique pourquoi le louisianais moyen est intéressé plutôt par les politiques républicaines, pourquoi le louisianais lit von mises au lieux de sartre? non, ça explique rien.

    Ok Trump ne fait pas partie de la clique des politiciens corrompus – il fait partie de « l’élite » dont, on se plaint, corrompt les politiciens! ça serait intéressant, par exemple, D’explique ce clivage dans l’esprit louisianais. là on lit ce truc, on apprend rien. C’est une espèce de mini-bio, mini-racontard dépourvue de sens et d’intérêt.

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