De l’importance d’une réforme alimentaire acadienne – Rémi Frenette

DE L’IMPORTANCE D’UNE RÉFORME ALIMENTAIRE ACADIENNE – RÉMI FRENETTE, MINISTRE DU TROC, DE L’ISOLATIONISME RURAL ET DE L’AUTOSUFFISANCE AGRO-IDENTITAIRE

*** À propos de la Réforme acadienne traditionnelle (RAT) ***

La RAT est un puissant et magnanime mouvement qui travaille depuis plus de deux ans à garantir la survie de l’Acadie. Notre mission est simple : retourner à l’âge d’or de l’Acadie, soit la période pré-Déportation. Malheureusement, depuis les évènements pervers de 1755, notre mode de vie ne cesse de se corroder au contact de la Modernité. La RAT s’engage donc contre vents et marées dans un projet politique visant à faire resurgir l’essence de notre beau pays. Dans cette dynamique réformiste, la revue Astheure devient un instrument de propagande, tout comme la Fédération des étudiants et étudiantes du Centre universitaire de Moncton, la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick ainsi que l’ensemble des leaders, organismes et entreprises francophones des provinces Maritimes. Vous l’aurez compris : la RAT est le pire cauchemar de l’Anglo Society of New-Brunswick.

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Aujourd’hui, fidèles et assidus lecteurs de la génération «Internet» (ou «Fleuve du Diable»), la RAT vous explique d’importants enjeux qui touchent à l’alimentation. Grâce au présent texte, vous verrez que le peuple acadien est non seulement pionnier dans l’art de bien se nourrir, mais que sa survie et son développement dépendent entièrement d’une alimentation saine et traditionnelle. D’où l’urgence de réorganiser nos valeurs et nos communautés à l’image des défricheurs d’eau.

Historiquement d’abord, les Acadiennes et Acadiens ont su développer les meilleures habitudes alimentaires de l’histoire humaine. Ce n’est pas pour rien qu’aux XVIIe et XVIIIe siècles, la qualité et l’espérance de vie des habitants du pays d’Évangeline faisaient l’envie de la planète entière. Par ailleurs, c’est cette parfaite alimentation transmise génétiquement qui permet à des gens comme Lydia Boudreau de vivre plus de cent ans encore aujourd’hui.

Pour constater ce légendaire patrimoine alimentaire, voyez les quatre groupes du Guide alimentaire canadien : 1) les produits céréaliers, 2) les légumes et les fruits, 3) les produits laitiers et 4) les viandes et substituts. Or, il faut comprendre que le Guide alimentaire RATien acadien traditionnel (GARAT) incorporait ces quatre groupes bien avant que le Canada ne se les approprie pour en faire un «guide national officiel», sans nous donner une miette de mérite, de droits d’auteur et de redevances financières. C’est une injustice qui ronge la société acadienne depuis trop longtemps et que nous décrions haut et fort.

D’ailleurs, ce scandale est à l’origine d’importantes manifestations partout en Acadie, dont la plus récente a eu lieu à Tracadie en février 2013 lorsqu’un «feu a été allumé en plein milieu de la rue Principale, au centre-ville». Même si les médias ont essayé de camoufler la rage des indignés sous le prétexte de la réforme de l’assurance-emploi, la RAT n’est pas dupe. Les Tracadiennes et Tracadiens revendiquaient, en vérité, des péréquations fédérales pour les profits malhonnêtes encaissés sur leur dos avec le plagiat canadien du GARAT.

Ce guide prend bel et bien racine dans l’épopée acadienne. En effet, dès les années 1640, les méga-fermes, méga-champs et méga-aboiteaux acadiens produisaient de multiples viandes, légumes, céréales et produits laitiers. Regardez le fricot avec ses patates, son poulet et ses boules de pâte. Il est habituellement chasé-down avec du bon jus de vache. Voilà, les quatre groupes alimentaires sont là. Nevermind le guide canadien!

Avec le GARAT qui comprend, entre autres, la râpure, le homard, le stew, la ploye, la poutine râpée, la mélasse et le pain maison à mémère, la RAT prend soin de votre santé. En plus des produits de la ferme et des champs, vous pouvez compléter votre assiette en cueillant des pommes, des framboises, des bleuets et d’autres délicatesses sucrées de nos forêts enchantées. Sans oublier la sarriette, les tétines de souris, les noisettes et le Dixie Lee ; des incontournables de notre fine cuisine. En y rajoutant la chasse et la pêche, il est clair que nous possédons déjà, depuis très longtemps, tout le nécessaire pour vivre éternellement dans l’abondance, l’isolement du reste du monde et dans le mode de vie pré-Déportation.

L’évidence  frappe alors tel un coup de sabot dans la clavicule. Comme plusieurs inventions révolutionnaires survenues depuis 1604 (notamment la barouette, la charpente, le up-and-down et la boussole), le guide alimentaire canadien s’inspire manifestement du génie de la civilisation acadienne. N’en soyez pas surpris cependant puisque des études empiriques et longitudinales démontrent que 96% de la technologie et du savoir humain en 2013 dérive directement ou indirectement du mode de vie acadien traditionnel. (Note : d’autres études démontrent que tout ce que la RAT affirme est vrai sans qu’elle ait à donner la source de ses études).

Outre l’historicité de nos saines habitudes de vie, comprenons que l’avenir de la société acadienne dépend entièrement de sa nourriture. La revanche des berceaux, le repeuplement francophone de l’Acadie des Maritimes et l’espérance de vie des descendants français. Tout cela ne sera possible que par un glorieux et strict retour au GARAT. Ce plan alimentaire va donc de pair avec le Plan de repeuplement de l’Acadie de la RAT (PRAR). À cause de l’imminente réforme des mœurs sexuelles, nous aurons bientôt des milliers de nouvelles bouches à nourrir d’Edmundston à Chéticamp, en passant par Saint-Simon (prononcé «Saint-Siman») et Egmont-Bay. Ainsi, il n’y a que le retour forcé et inviolable au mode de vie pré-Déportation qui puisse garantir notre survie, notre bonheur et notre effervescence.

Je dis bien «retour» car comme vous le savez, nous sommes de moins en moins maîtres de notre alimentation. La malbouffe américaine fait des ravages. Les multinationales étouffent nos coopératives. Pire, à Moncton il y a plus de restaurants Deluxe que de Dixie Lee. Sacrilège! Cette triste situation n’est cependant pas la conséquence d’un peuple martyr qui aurait baissé les bras. Non! Notre décadence gustative serait plutôt l’aboutissement d’un plan orchestré par nul autre que Charles Lawrence. Hélas! L’immondice de ce personnage n’avait d’égal que son intelligence tordue, car un des objectifs à long terme de la Déportation consistait à détruire le tissu socio-alimentaire du peuple acadien. C’est avec amertume que nous constatons aujourd’hui le succès partiel de cette entreprise …

Mais un succès «partiel», dis-je, puisque déjà la résistance s’organise. Au Nouveau-Brunswick par exemple, grâce à une entente récente entre la Récolte de chez-nous et le Réseau des cafétérias communautaires, «tout au long de l’année, les jeunes du District scolaire francophone Sud auront droit à des produits locaux dans les cafétérias d’une vingtaine d‘écoles». Bravo! Cependant, nous devons faire plus que manger localement. Il nous faut aussi manger de la pizza traditionnelle et surtout, nous devons supporter le restaurant préféré des Acadiennes et Acadiens : le Dixie Lee.

En effet, l’étendue géographique du Dixie Lee constitue une preuve incontestable que ce restaurant est au cœur de nos communautés. L’acadianité du Dixie Lee, dont le poulet frit est saupoudré d’épices louisianaises, dépasse les frontières des Maritimes pour rejoindre nos cousins cajuns. C’est pourquoi vous trouverez le commentaire suivant sous la photo de profil Facebook dudit restaurant : «C’est le chanteur Bruce Daigrepont qui est un fan du poulet Dixie Lee. Il veut en avoir à la Nouvelle-Orléans.» Et justement, l’excellente pièce «Acadie à la Louisiane» de Bruce Daigrepont contient des messages subliminaux selon lesquels les Cajuns revendiquent la présence du Dixie Lee de l’«Acadie à la Louisiane». Incroyable, mais vrai.

Alors, chères lectrices et chers lecteurs, mangez bien, mangez localement et mangez du Dixie Lee. Oubliez le guide alimentaire canadien et brûlez-le si vous tombez par hasard sur une copie papier. Brulez-le en public et devant les médias si possible, afin d’apprendre à d’autres la source de votre indignation et d’exiger de l’argent du fédéral pour le vol consciencieux de notre guide alimentaire ancestral. Aussi, procurez-vous aussitôt que possible une copie de La cuisine traditionnelle en Acadie ou, encore mieux, prenez-en note et partagez les recettes traditionnelles de vos parents, grands-parents et arrière-grands-parents. Vous déjouerez ainsi les plans diaboliques de Charles Lawrence en plus d’assurer ni plus ni moins la survie de l’Acadie.

– La RAT est puissante –

 À propos…

Remi_Frenette JPEG

Rémi Frenette est bachelier à l’Université de Moncton d’une double majeure en histoire et en études françaises. À Moncton, il travaille au Musée acadien de l’Université de Moncton et au Conseil provincial des Sociétés culturelles. L’Acadie est son terrain de jeu historique, politique et culturel. Il joue dans deux groupes de musique francophones, a participé à deux Parlements jeunesse acadiens, a fondé l’émission de radio satirique Réforme acadienne traditionnelle et s’implique dans la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick. De surcroît, il cultive un intérêt particulier pour le développement culturel communautaire, les luttes contre l’endettement étudiant et les enjeux reliés aux Premières Nations canadiennes.

2 réponses à “De l’importance d’une réforme alimentaire acadienne – Rémi Frenette

  1. La réforme alimentaire acadienne passe par la relève agricole aussi. Or, la relève agricole acadienne est en danger!

    Selon statistique Canada, «sur l’ensemble de la population agricole du Nouveau-Brunswick en 2006, 75,3 % ont déclaré que l’anglais était leur langue maternelle, 21,9 % le français et le reste (2,8 %) […]» tandis que «le profil pour la population générale de la province en 2006 était différent, puisque 65,1 % ont déclaré avoir comme langue maternelle l’anglais, 33,0 % le français et les 1,9 % restants […]»

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