Julie Caissie [artiste], horizon commun(s), Moncton, Galerie Sans Nom, 22 novembre 2018 au 25 janvier 2019.
NDLR : Les peintures de l’artiste sont présentement en exposition à la Galerie Beaverbrook de Fredericton jusqu’au 15 décembre 2019.
Du 22 novembre 2018 au 25 janvier 2019 au deuxième étage du centre culturel Aberdeen, dans l’exposition horizon commun(s) de Julie Caissie, nous avons accès à une panoplie de peintures sur toiles à caractère abstrait. En parcourant du regard les diverses toiles, il n’y a pas nécessairement de formes ou de concepts sur lesquels nous pouvons nous accrocher avec certitude dans cette exposition. Horizon commun(s), selon les mots de l’artiste, c’est une exploration par rapport à la relation entre l’artiste et la technique. C’est-à-dire que Caissie expérimentait avec sa position relative à la toile. Pour la conception d’un certain tableau (ils sont tous sans titre), elle a répété un mouvement avec le bras tenant le pinceau, mouvement qui rappelle celui qu’un enfant (ou un adulte ayant conservé son cœur d’enfant) ferait lorsqu’il fait des anges dans la neige. L’artiste voulait ainsi voir les possibilités, mais aussi les limites du mouvement que peut lui apporter son corps par rapport à la toile.
Quoique cette exploration est fort intéressante, ce qui m’a particulièrement interpelé dans l’exposition, c’est le jeu des couleurs. Tous les tableaux, malgré leurs différences, ont été produits avec le même registre de couleurs. Il y a un mariage entre des couleurs qu’on peut qualifier comme étant naturelles, comme du vert forêt ou du bleu ciel avec des couleurs qu’on pourrait qualifier comme étant fabriquées et humaines, c’est-à-dire du vert ou du rose fluorescent. Dans chacune des œuvres, nous voyons cette dynamique s’opérer.
De plus, malgré le caractère abstrait des œuvres, nous pouvons y distinguer des représentations d’objets ou de paysages. J’ai en tête un tableau qui pouvait démontrer une falaise et une chute d’eau près d’une côte. Ou un autre où il était possible de reconnaître une tente, ou encore, dans un autre, un parapluie. Bref, nous pouvions voir, ou plutôt déchiffrer des paysages «naturels» dans certaines toiles et des objets «humains» dans d’autres. Toutefois, peu importe la toile, les mêmes couleurs se faisaient voir. Pas nécessairement dans la même proportion, mais elles y étaient tout de même.
Je suis alors venu à la conclusion qu’il pouvait y avoir réciprocité, peu importe le contexte, de l’influence humaine sur la nature et de l’influence de la nature sur les êtres humains. De nos jours, cela se voit plus que jamais. L’être humain a toujours tenté de conquérir la nature et de la soumettre à son vouloir. En 1967, à l’expo de Montréal dont le slogan était «La terre des Hommes», on croyait y avoir réussi. Malgré les efforts de la dompter, de la dominer, de la plier aux désirs humains, nous n’avons qu’à suivre l’actualité afin de voir que la nature n’a pas dit son dernier mot. En d’autres mots, il y a un équilibre fragile auquel nous faisons présentement face, entre l’activité humaine et la santé écologique. C’est une réalité qui est présente partout où existe l’être humain.
Il est fort probable que Julie Caissie ait été sensibilisée à cette réalité par sa «connexion très spéciale avec les Îles de la Madeleine», situées au milieu du Golfe du Saint-Laurent, donc exposées et particulièrement vulnérables aux forces de la nature.
Bref, au lieu de continuer à agacer la nature, à la provoquer, nous devons tous travailler ensemble pour résoudre la question écologique, sinon nous allons devoir subir les conséquences ensemble, aux Îles de la Madeleine, à Washington D.C., à Paris comme à Ottawa. Malgré toutes les différences chez les êtres humains de la planète, la situation écologique nous unit. Elle nous donne un problème que nous devons résoudre ensemble. Nous avons dorénavant un horizon commun.
À propos…
Nicolas Washburn est sociologue de formation et rédacteur d’art en herbe. Il a reçu son baccalauréat en sociologie à l’Université de Moncton en 2015 et a récemment déposé son mémoire de maitrise, aussi en sociologie, à l’Université du Québec à Montréal. Depuis septembre 2018, il occupe le poste de conservateur-adjoint à titre de stagiaire à la Galerie d’art Louise-et-Reuben-Cohen.