Le Charlotte County Abuse Prevention Network a récemment célébré le travail du défunt Conseil consultatif sur la condition de la femme du Nouveau-Brunswick en appui aux femmes victimes de la violence masculine. Le Conseil a été reconnu pour le travail «passionné et soutenu», de 1977 à 2011, d’une centaine de Néo-Brunswickoises qui étaient membres (le Conseil a été aboli en 2011 par le premier ministre David Alward et par la ministre Margaret-Ann Blaney).
J’étais une employée de ce Conseil pour la plupart de ces années et je suis là pour vous dire que ces femmes méritent cette reconnaissance.
Je veux vous parler d’un temps.
Moins de deux ans après sa création, le Conseil a publié la brochure Battue/Battered, la première au Canada sur le sujet.
La première au Canada.
Le Conseil a pensé de faire cette publication – genre : Qu’est-ce qu’une femme battue? – en réaction au nombre de visites et d’appels reçus au bureau du Conseil, aussitôt qu’il a eu pignon sur rue, de femmes victimes de leur partenaire. Victimes d’un problème si tabou que même la Commission royale d’enquête sur la situation de la femme au Canada ne l’avait pas mentionné dans son rapport publié en 1970 – la violence masculine dans les rapports intimes.
Cette violence masculine est tenace et les actions du Conseil ont rencontré de la résistance. Une résistance qui dure.
«Pourquoi vous dites qu’il y a des hommes qui agressent leur femme?»
«À Toronto, peut-être, mais il n’y a pas de ces cas au Nouveau-Brunswick.» – affirmation d’un ministre du gouvernement.
«Vous brisez les familles. Vous aidez les femmes à quitter.»
«Oui, mais, pourquoi elle reste?»
«La police a mieux à faire que de répondre à toutes les disputes de famille.»
«L’affaire est classée, le couple est mort, il faut respecter la vie privée de la famille. L’affaire est clos.»
«Pourquoi elle reste?»
«Le gouvernement du Nouveau-Brunswick est heureux d’ouvrir cette – énième – maison de transition.»
«La violence faite aux femmes arrive souvent parce que les femmes la cherchent vraiment en faisant des remarques et en critiquant leur partenaire» – affirmation avec laquelle était d’accord le tiers des Néo-brunswickois sondés en 2009.
Le Conseil a lutté contre ces attitudes et leurs effets, et contre le tabou de parler de ce problème. Il a surtout lutté contre le manque d’intérêt du public, du gouvernement, des professions – l’absence de données statistiques (jusqu’à ce jour), de protocoles d’aide et de mises en accusations. Il a voulu faire voir que c’est un problème sociétal. Au moins un problème des hommes, et non pas des femmes.
Le Conseil a initié des dizaines d’études, de publications et d’événements sur le sujet, sans oublier des campagnes de revendication pour des lois et des services.
Dont les affiches des «poster boys». Ça ç’a fait parler, et pas seulement parce qu’ils étaient beaux.
La première affiche. Neuf hommes, dont le lieutenant-gouverneur Herménégilde Chiasson, le premier ministre Bernard Lord et les annonceurs de nouvelles télé Abbé Lanteigne de Radio-Canada et Steve Murphy de ATV, qui disent : «Il n’est pas suffisant pour nous, en tant qu’hommes, de ne pas être violents. Nous ne tolérons pas le manque de respect ni la violence autour de nous.»
Suivra une autre campagne du Conseil, mais visant les jeunes, avec, entre autres, le musicien blues JP LeBlanc et le chanteur rap Red Suga de la Première nation Pabineau (auteur de la chanson «Too Much to Bear»). Le message : «La violence autour de moi? Je dis non. La violence ne passera pas par moi.»
En même temps qu’il travaillait sur le dossier de la violence masculine, le Conseil avait un nombre grandissant d’autres dossiers féministes – autant de dossiers qu’a le gouvernement, disait une présidente, parce que presque tous les dossiers gouvernementaux ont un impact différent sur les hommes blancs – pour qui ils sont conçus – que pour les autres citoyens.
Le Conseil a bientôt vu que, comme sait toute féministe, tout est relié. Ses actions sur d’autres dossiers bénéficieraient aux femmes violentées en premier : la division des biens matrimoniaux, les droits à la garde des enfants, la division des pensions, l’aide juridique pour les causes civiles, le droit aux emplois et les services de garde.
L’objectif féministe dans ce dossier est d’éliminer la violence. Si on ne fait qu’aider les victimes, on risque de ne ne faire rien d’autre que rendre le statu quo confortable.
Allez trouver quelqu’un aujourd’hui qui nous rappelle ça.
À propos…
Rosella Melanson est Acadienne, blogueuse et activiste. Elle a une formation en travail social, en journalisme et en technologie de l’information. Elle a surtout été à l’emploi du Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick. À la retraite, elle voyage et écrit, et quand elle est au Nouveau-Brunswick, elle est commentatrice politique.