Depuis la réforme Murphy en 2008, le gouvernement du Nouveau-Brunswick, qu’il soit libéral ou conservateur, a enlevé, petit à petit, des services à la régie de santé francophone. Ces services étaient auparavant sous l’autorité des huit régies régionales de la santé.
En 2008, le gouvernement a formé une société de la Couronne qui a pris en main les services de buanderie, d’informatique et de communication en plus des achats et de l’ingénierie biomédicale. Cette nouvelle structure appelée FacilicorpNB était et est demeurée une société anglo-domimante depuis sa création jusqu’à ce qu’elle soit intégrée à ServiceNB. Non seulement la régie Vitalité a perdu son expertise francophone dans ces trois secteurs d’activité, mais pour avoir accès à ces services, elle est à la merci de cette structure. Pire, nous avons constaté que les décisions sont prises, de plus en plus, en fonction de la régie Horizon et du ministère de la Santé.
FacilicorpNB a coûté cher à la province. Beaucoup plus que les estimations qui avaient été réalisées par les fonctionnaires du ministère de la Santé et beaucoup plus cher que ce que promettait le ministre des Finances de l’époque, Victor Boudreau. On affirmait alors que la province allait presque éponger son déficit avec toutes les économies qui allaient être réalisées. Encore aujourd’hui, il nous est impossible de déterminer les sommes exorbitantes que la province a dépensées pour FacilicorpNB, faute de transparence de la part du gouvernement et de cet organisme. Le service offert par FacilicorpNB a causé des maux de tête tant à la régie francophone qu’à la régie anglophone.
Comme d’habitude, lorsque le gouvernement commet des erreurs, au lieu de revenir à la situation antérieure, il a englouti FacilicorpNB dans Service NB. Les dirigeants qui n’ont pas pu faire fonctionner FacilicorpNB ont eu des promotions au sein du gouvernement. Plusieurs se sont retrouvés à Service NB, entité dont nous avons beaucoup entendu parler dernièrement à cause du dossier des évaluations foncières.
Les conservateurs sont arrivés au pouvoir en 2010, ils ont rapidement mis de côté les projets de privatisation des autres services hospitaliers sans nous dire pourquoi. Toutefois, quand les libéraux sont revenus au pouvoir en 2014, l’ex-ministre de la Santé, Victor Boudreau, a concocté un autre projet de privatisation, soit celui des services alimentaires, d’environnement (entretien) et de transport des patients. Cette fois-ci, il voulait donner la gestion de ces trois services à l’entreprise Sodexo.
Sodexo est une entreprise qui a déjà offert des services dans notre province, mais qui n’y est plus active. Comme le dit la chanson, «allez donc savoir pourquoi». La régie Vitalité étudie alors la situation des services alimentaires et, chiffres en main, affirme qu’elle peut réaliser plus d’économies avec moins de pertes d’emplois. Le ministre Boudreau refuse. Pourtant, il disait vouloir faire affaire avec Sodexo pour faire des épargnes. Vitalité en promet plus, mais il refuse. Belle logique!
Avant de perdre son poste de ministre de la Santé, Victor Boudreau impose la privatisation de la gestion du Programme Extra-Mural et donne le contrat à Medavie sans aucun appel d’offres. Il avoue même que cela coûtera plus cher! Son successeur, Benoît Bourque, avoue qu’aucune étude portant sur le Programme Extra-Mural n’a été réalisée et nous dit sans rire que «quand ça va bien, c’est le temps de faire des changements!» Au cours des derniers mois, nous avons entendu parler d’une étude sur les laboratoires médicaux et d’un objectif d’une gestion provinciale. Qui dit provincial dit bilingue donc anglophone!
Pourquoi devrions-nous nous opposer à ces projets de privatisation? Premièrement, il faut avouer que nous aurions dû nous opposer de façon plus vigoureuse à la création de FacilicorpNB qui fut un désastre financier. Pourquoi s’opposer à la privatisation de nos services hospitaliers? Il y a plusieurs raisons. La première c’est que la régie Vitalité est capable d’augmenter son efficacité et son efficience. Elle nous l’a prouvé dernièrement en mettant en œuvre un programme d’amélioration des cafétérias qui a généré des épargnes de plus de 1,6 million de dollars par rapport à ce que Sodexo proposait?
De plus, ces projets de privatisation ont comme conséquence de réduire les expertises de la communauté francophone puisque le personnel qui travaillait en français doit aller travailler dans un milieu bilingue, donc anglophone. N’ayant pas le contrôle de plusieurs services, la régie Vitalité ne peut pas mettre en place des initiatives pour s’améliorer et donc mieux servir sa population.
Ces nouveaux intervenants dans les soins de santé ne sont pas au courant des problèmes du réseau et ne constituent qu’une autre bureaucratie. Dans le dossier de l’Extra-Mural, le modèle qui sera mis en place ne sera connu que dans trois ans. Pourtant le programme Extra-Mural fonctionne très bien actuellement.
L’argument le plus préoccupant pour les francophones est que, petit à petit, le ministère est en train de vider la régie de tous ses services. Une régie sans tous les services ne constitue plus une institution pleine et entière pour la communauté francophone.
Comme communauté linguistique minoritaire, nous devons et avons le droit de contrôler nos institutions, y compris dans le monde de la santé. C’est une question de survie, de développement et d’épanouissement.
À propos…
Dr Hubert Dupuis pratique la médecine familiale à Cocagne. Il est président d’Égalité santé en français.
Mille fois Merci au Docteur Dupuis pour son engagement dans le dossier de la Santé et pour la francophonie dans son ensemble.