Dans la foulée des opinions qui ont été exprimées pour réagir au logo «Right fiers», logo qui lance la campagne des Jeux de la francophonie canadienne 2017 qui se tiendront dans la région du Sud-Est, des jeunes ont choisi une expression chiac qui, selon plusieurs, représente la réalité des jeunes de la région du Grand Moncton. Cependant, je me demande si, lors des discussions pour choisir le logo, on s’est interrogé à savoir si celui-ci représentait l’ensemble des jeunes, notamment celles et ceux issus de familles immigrantes francophones arrivées sur le territoire depuis les dernières années. Si nous voulons intégrer ces jeunes et leurs familles, ne faudrait-il pas changer un vieux réflexe de nous percevoir comme une société acadienne monolithique? On entend souvent, de la part de familles récemment arrivées en Acadie, que notre société n’est pas très inclusive et qu’elle éprouve des difficultés à tenir compte de leur réalité. Or, est-ce que choisir une expression franglaise, par et pour les jeunes, afin de faire la promotion d’une région acadienne et francophone de plus en plus diversifiée, est vraiment la meilleure approche pour représenter l’ensemble de la jeunesse acadienne et francophone?
Nous comprenons qu’en contexte francophone minoritaire et, plus particulièrement, en milieu anglodominant, comme c’est le cas dans la grande région de Moncton, l’apprentissage de la langue française se bute à plusieurs obstacles dont la socialisation. En effet, plusieurs jeunes ont appris à valoriser la langue dominante, soit l’anglais. Nous n’avons qu’à naviguer dans les médias sociaux pour constater jusqu’à quel point une majorité de jeunes (et moins jeunes) acadiennes et acadiens issus ou non de familles exogames s’expriment dans la langue de Shakespeare pour communiquer entre eux. Ne devrions-nous pas nous indigner (nous préoccuper ou nous inquiéter) devant l’importance que nos jeunes acadiens accordent à l’utilisation de l’anglais dans leurs relations? Sommes-nous surpris de constater que ces mêmes jeunes vivent de l’insécurité linguistique dans nos écoles francophones? Et que dire de l’échec des étudiantes et étudiants au test de français à la Faculté des sciences de l’éducation la semaine dernière.
En passant, je tiens à souligner que je ne méprise pas le chiac. Je pense même que ce niveau de langue est une dimension importante de qui nous sommes et de notre culture acadienne dans le Sud-Est. De plus, j’apprécie nos divers accents. Que l’on soit de Baie-Sainte-Anne, de Shippagan, de Grand-Sault, de Fredericton, de la Baie Sainte-Marie ou de l’Île Madame, ces différents accents sont de la musique à mes oreilles et permettent d’identifier nos régions respectives.
Revenons au concept d’insécurité linguistique mentionné dans plusieurs écrits depuis quelques jours. Certains ont justifié le choix du logo «Right fiers» en disant, grosso modo, que le motif du choix était, entre autres, de contrer l’insécurité linguistique des jeunes. Depuis les dernières décennies, des sociolinguistes ont étudié ce phénomène et ont apporté un éclairage important au domaine linguistique et aussi en éducation. L’insécurité linguistique prend ancrage dans un contexte où deux langues se côtoient et où une de ces deux langues est minoritaire, comme c’est le cas du français en Acadie.
Les résultats de ces études font que nous avons une meilleure compréhension du vécu langagier des jeunes acadiennes et acadiens qui fréquentent nos établissements scolaires, particulièrement dans les régions anglodominantes. Se sentant incompétents dans leur langue maternelle et plus à l’aise en anglais, ces jeunes en viennent à développer un sentiment d’insécurité face à l’utilisation du français standard dans les salles de classe. D’un autre côté, l’enseignement dans les écoles en contexte francophone minoritaire a changé. Avec le virage pédagogique des dernières années, où on est passé d’une approche pédagogique axée sur l’enseignement à une pédagogie qui place l’apprenante ou l’apprenant au cœur même de l’acte d’apprendre, le personnel scolaire comprend mieux que l’étudiante ou l’étudiant doit être actif, impliqué et responsable dans ses apprentissages. Pour ce faire, les élèves doivent communiquer les uns avec les autres. Qui plus est, les études en sciences cognitives ou études portant sur l’apprentissage ont aussi informé le milieu de l’éducation du traitement des informations humaines qui permet aux jeunes de faire des liens entre leurs connaissances antérieures et les nouvelles connaissances. C’est ainsi qu’il est important, pour apprendre de nouveaux savoirs peu importe le domaine, d’aider les apprenantes et les apprenants à activer leurs connaissances antérieures.
Or, dans ce renouveau pédagogique, le rôle des enseignantes et des enseignants a donc changé pour être plus à l’écoute des jeunes en milieu francophone minoritaire et, par conséquent, avoir une meilleure compréhension de la réalité des élèves. Autrement dit, dans un contexte où les jeunes s’expriment avec un niveau de langue populaire, le personnel enseignant doit partir de cette réalité pour augmenter les connaissances linguistiques des jeunes de manière à ce qu’ils puissent s’exprimer dans un français correct et, par conséquent, diminuer leur insécurité linguistique. C’est ainsi que les enseignantes et les enseignants guident l’élève de façon à transcender cette insécurité pour se sentir plus en confiance et s’exprimer dans un français correct. Dans cette logique, non seulement l’école mais aussi la communauté et la famille doivent contribuer à enrichir les apprentissages linguistiques des jeunes.
En terminant, je crois que le choix de valoriser le franglais dans un logo de promotion de notre culture acadienne et francophone pour les Jeux de la francophonie 2017 peut nuire davantage au processus d’apprentissage linguistique des jeunes et, ainsi, accentuer leur insécurité linguistique. Cela ne renvoie-t-il pas un message aux jeunes, qu’en Acadie, on n’a pas à améliorer nos connaissances linguistiques ni à faire les efforts requis pour transcender son niveau de langue française?
À propos…
Jeanne d’Arc Gaudet est titulaire d’un doctorat en éducation de l’Université de Montréal. Professeure titulaire à la retraite de l’Université de Moncton depuis un an, elle a récemment reçu le statut de professeure associée à la Faculté des sciences de l’éducation de cette même université. Elle occupe aussi le poste de présidente de la Société de l’Acadie du Nouveau-Brunswick (SANB) depuis bientôt trois ans. Au cours de sa carrière de professeure/chercheuse, elle a publié de nombreux documents de recherche, livres et articles et elle a prononcé des conférences dans plusieurs pays. Les questions qu’elle a étudiées dans ses recherches portaient, entre autres, sur l’éducation en milieu francophone minoritaire ainsi que sur le rôle des femmes en éducation et dans des postes décisionnels. De plus, Madame Gaudet a été particulièrement active au sein de nombreux comités, organismes et conseils d’administration, tant à l’échelle provinciale qu’à l’échelle nationale. Elle a occupé, entre autres, le poste de présidente du Conseil consultatif sur la condition de la femme au Nouveau-Brunswick.
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Je parle un français « standard » mais je suis aussi capable de parler « right » chiac. Je suis 100 % Acadien. Et je suis fatigué de voir le discours dominant sur l’Acadie dans la région du Sud-Est de la province être monopolisé par un groupe de « pro-chiac » qui voudrait faire taire le reste des francophones. Il y a plein de francophones dans le Sud-Est qui ne parlent PAS le chiac. Vous ne parlez pas pour moi. Et pourtant je ne suis pas moins Acadien que vous. Je trouve cela triste que ce genre de débat doit toujours être lancé par des gens de l’extérieur, parce que ceux qui vivent ici et osent le faire deviennent des parias. Je n’ai rien contre le chiac comme un registre de langue, un dialecte, un parler régional, entre amis. Par contre, est-ce qu’on n’est pas en train de franchir un pas de plus vers la « normalisation » de l’anglais et l’assimilation en acceptant un mot anglais dans un slogan pour les Jeux de la francophonie ? Où est la ligne entre le fait d’être « inclusif » et de faire la promotion de l’anglais ? Chaque fois qu’on cède un pouce à l’anglais, il prend un mètre. Il ne faut pas se le cacher : vivre en français au N.-B. est un CHOIX. Il faut arrêter de se déresponsabiliser. Les générations précédentes se sont battues pour que nous ayons des droits, des institutions francophones, pas chiaques. J’entends plein d’histoires au sujet d’enfants qui sont victimes d’intimidation dans les écoles du Sud-Est parce qu’ils parlent un français « standard » et non le chiac…Sommes-nous vraiment rendus là ? Est-ce vraiment cela être « inclusif » ? Pourquoi exclure ceux qui ne parlent pas le chiac ? Qui rejette qui ?
Des jeunes qui se font écoeurer parce que leur accent, ou leur vocabulaire, diffère de la majorité locale, ça arrive partout, pas seulement dans le SE du NB. Moi non plus, je ne suis pas originaire du Grand Moncton, mais j’y habite aujourd’hui. Le chiac ne m’appartient pas, même si en contexte familier, je saupoudre mon langage d’occasionnels mots anglais.
Mais le chiac, et un certain niveau de franglais, est encore représentatif de la région. Ça représente tout le monde? Bien sûr que non! Mais de nier cette réalité locale pour jouer la victime parce que les « gros méchants chiacs m’acceptent pas », c’est un peu pathétique! Les « pro-chiac », comme vous les nommez, ne cherchent pas à faire taire les autres Acadiens. Ils sont plutôt écoeurés de se faire marginaliser, de se faire taper dessus. Ils comprennent l’importance de se doter d’un niveau de langue française qui facilite la communication avec les autres francophones. Mais ils en ont assez de se faire dire qu’ils parlent mal, qu’ils sont de mauvais francophones.
Ils ne prétendent pas que le chiac est une représentation universelle de l’Acadie. Ils cherchent simplement à légitimiser que c’est une représentation bien réelle de « leur » Acadie, qu’on le veuille ou non… Et vivre en français au NB est un choix? Absolument! Et le choix de ne pas délaisser l’école française est encore plus louable pour ces jeunes baignés dans l’anglais quotidiennement. Je fais tout en mon pouvoir pour qu’ils aient le goût de continuer à vivre leur francophonie.
L’un des gros problèmes dans ces discussions, c’est que trop de gens pensent qu’il y a UNE Acadie, alors qu’il y a plutôt DES AcadieS. Quand on acceptera la multiplicité des identités Acadiennes, on fera du chemin!
Et, en passant, contrairement à votre avatar, je trouve que, dans ces discussions, nos noms sont importants. Mais ça, ce n’est que mon opinion…
Comme je l’ai dit, ce qui compte, ce n’est pas mon nom, mais mon commentaire. C’est trop facile pour les gens de regarder le nom et de discréditer le commentaire en se disant : « Ah, c’est un maudit Québécois / Français, etc. etc. » Parce qu’évidemment, quiconque provient de l’extérieur est un Étranger et ne peut pas avoir de regard lucide sur une situation. Je suis certain que plusieurs personnes pensent comme moi, mais se taisent, de peur…Et avec raison. SVP indiquez-moi où j’ai affirmé que les chiacs parlaient « mal » ou sont de « mauvais francophones ». Je n’ai pas dit cela. Mais chaque registre de langage a sa place. Et pour moi, le chiac n’a pas d’affaire dans le slogan d’un événement francophone d’envergure comme les Jeux.
Évidemment, chacun peut être d’accord ou non avec le choix du slogan. C’est votre victimisation que je trouve faible. Mais, bon, si vous vous sentez comme ça, c’est dommage. Ce que je soulignais, c’est que « l’agressivité » que vous ressentez des « chiaqueux » n’est probablement que les premiers pas d’une affirmation après des décennies d’opression. Faudrait peut-être accepter qu’ils ont finalement le droit de s’exprimer.
Vous dites, dans votre commentaire, qu’ils ne parlent pas pour vous. Et bien soit: laissons-les parler pour eux!
Pour une fois Yves je suis entièrement d’accord avec toi.
Je n’ai pas beaucoup de temps, mais je trouve que votre nom est important et je tiens à le dire, parce que si vous vivez à Moncton, vous ne pouvez pas ne pas avoir vu l’affiche « C’est Right Short » du FICFA. Comment se fait-il que le « Right Short » du FICFA ne vous dérange pas? Qu’est-ce qui vous prend? Pourquoi vous attaquez-vous aux jeunes alors que vous ne dites absolument rien au sujet du franglais ridicule de Moncton qui se fait passer pour du chiac? Posez-vous la question. Les jeunes font preuve d’une plus grande sensibilité linguistique que certains autres. Oui, votre nom est important, parce que vous pourriez, d’un côté, avoir conçu le titre « C’est Right Short » ou boire de la bière avec ceux qui l’ont conçu, et d’un autre côté, condamner le « Right fiers » des jeunes. Oui, votre nom est important. C’était right court.
Et voilà où j’ai un désaccord idéologique avec vous, madame Gaudet. Bien que j’aime savoir que vous êtes au courant des études sur l’insécurité linguistique, je comprend l’enjeu différemment. Ce n’est pas à travers de l’enseignement d’un « français correct » qu’on va finir par atténuer l’insécurité linguistique. Déjà en faisant la distinction entre un « français correct » et le chiac, le second devient nécessairement son opposé, soit une « français incorrect ». C’est possiblement pas ce que vous entendez faire comprendre, mais il reste que c’est la dichotomie que vous faites.
Je réponds à votre commentaire dans le paragraphe précédent. Je suis moi-même une acadienne de la région du Sud-Est qui a vécu son lot d’insécurité linguistique, étant jeune. Comment l’ai-je vaincue? Par une éducation où j’ai appris que la langue française est celle de mes ancêtres et que lorsqu’ils sont arrivés en terre d’ Amérique, ils ne parlaient pas le chiac, que notre langue est belle et lorsqu’on la maîtrise, elle nous permet d’articuler notre pensée de façon claire et précise. Autrement dit, elle permet d’exprimer précisément ce qu’on a dans l’âme et dans la tête. De plus, au fur et à mesure que j’apprenais à mieux m’exprimer, mon niveau de sécurité linguistique disparaissait. Alors, il ne s’agit pas seulement de m’appuyer sur des textes théoriques, je parle aussi d’une expérience personnelle.
Jeanne d’Arc
Merci de la précision madame Gaudet. Je suis désolé d’entendre que vous avez faite face à de l’insécurité linguistique; ça vous humanise à mes yeux, chose importante à tenir compte, surtout derrière nos claviers.
Je suis content d’entendre que c’était une source d’ « empowerment » pour vous; Cela dit, l’expérience dont j’ai vécu (ainsi que plusieurs autres personnes de ma tranche d’âge) est différente, et nous trouvons que le « français correct » ne sert qu’à nous limiter dans l’expression de nos pensées. Je ne veux pas que ce fait en enlève de votre expérience et de votre vécu, mais tout simplement la conscience que différentes personnes (ou générations dans ce cas) trouvent différentes sources d’ « empowerment » quand ça vient à l’insécurité linguistique.
Monsieur Boutin…il faut vous remercier d’avoir pris le temps de nous rédiger un grand papier pour nous éclairer dans ce débat. Je ne vous poserai pas toutes les questions que vous avez soulevé dans mon esprit, Je me limiterai à celle que vous a posée celui qui a écrit: « En bout de ligne, selon vous, à qui revient la responsabilité d’assurer la vitalité du français ? Aux médias ? À La Plaise ? À TFO ? aux adultes ? à chacun de nous ? J’aimerais entendre vos pensées à ce sujet. J’ajouterais que je serais heureux de comprendre ce que vous voulez dire en écrivant: « Ce n’est pas à travers de l’enseignement d’un « français correct » qu’on va finir par atténuer l’insécurité linguistique. »….en d’autres mots, ma question: Comment pourrions-nous atténuer l’insécurité linguistique autrement que par l’enseignement? avec les parents et la communauté, évidemment.
Je viens justement de réponde à la première partie de votre question dans les commentaires de mon article!
Pour ce qui en est de votre autre question, de comment atténuer l’insécurité linguistique autrement que l’enseignement; c’est possible que nous allons avoir des différence de perception, mais je pense qu’il s’agit qu’il y a un besoin pour des espaces au-delà des écoles où on peut parler en français, mais aussi que l’on veule parler en français, qu’on se sent en sécurité de le parler. Une remarque que j’ai souvent entendu lors de mon parcours auprès des réseaux jeunesses, c’est que l’école devient très souvent un lieu où on est pas à l’aise de parler en français, par peur de ce faire reprocher par individus en positions de pouvoir, pour notre niveau de langue. Tant qu’à moi, il est bien plus important d’être confortable à parler que de bien parler. Souvent, les jeunes ne se sentent pas encouragés, mais forcés de parler en français, créant alors un cercle vicieux de honte et de culpabilité.
C’est facile de juste proposer que les personnes en pouvoirs soient plus empathiques, mais c’est un peu plus complexe que ça. Dans plusieurs communautés aussi, il n’existe pas de vie sociale en français, mis à part les associations, qui sont souvent perçus comme étant militant en nature, et donc, peu attrayant. D’avoir des espaces, soit physiques ou par internet, dans un contexte non-associatif et non-militant, pourrait contribuer à normaliser l’utilisation, et en conséquence, l’aise et l’attachement envers la langue française. Je pense qu’il est important de séparer les notions d’associatif et de communauté, qui ont longtemps étés synonymes dans nos contextes, et puis d’en faire deux entités ayant des buts différents, soit le militantisme et le rassemblement respectivement. Je ne dis pas nécessairement que le milieu associatif n’a plus sa place ou son utilité, mais je crois qu’il y a un « shift » dans sa raison d’être.
La contextualisation est un défi dans toutes les langues du monde, où une langue se régionalise et intègre des expressions qui lui sont propres. En espagnol, certaines lettres ne sont même pas prononcées de la même façon en Europe qu’en Amérique Latine, mais on ne va pas pour autant dire que l’une des formes d’espagnol est supérieure à l’autre. Et ça, c’est un exemple extrêmement global, je n’entre même pas dans les expressions plus régionales!
Pour revenir au français, c’est là qu’est le défi de la chose, justement: apprendre à contextualiser et dire « cette forme de langage s’utilise principalement dans un tel contexte et l’autre forme dans un autre ». Le Franglais, tel qu’appelé ci-haut, est un mélange langagier qu’il n’est pas rare de croiser, donc son existance ne peut être nié et il s’agit d’un dénominateur fort pour souligner et célébrer les différences langagières du Canada français.
Martin, où as-tu lu dans tout ce qui s’est écrit depuis une semaine, que quelqu’un aura nié l’existence du franglais (le chiac)? Par ailleurs, prononcer les mots différemment d’une région à l’autre ne relève pas de la linguistique, mais des accents. Le débat soulevé par ce slogan ne porte pas sur la diversité des accents, mais sur le caractère de la langue parlée, n’est-ce pas!
Bravo Jeanne d’Arc pour ce texte! Je ne suis pas entièrement convaincu que ce simple logo soit une raison suffisante pour s’entredéchirer; c’est pourquoi je désire saluer le ton vraiment posé, modéré et renseigné, avec lequel tu exposes ces réflexions! Quant à mon opinion, elle n’est pas si tant importante, alors je me bornerai à dire que malgré la différence de point de vue (qui n’est pas irréconciliable), je trouve pertinent et intéressant que tu aies pris position, avec cette maîtrise des idées et de la langue qui te caractérise. Dans le milieu de l’édition littéraire, nous vivons constamment avec cet enjeu précis : rehausser le niveau langagier des jeunes tout en s’abstenant de condamner ou de nier la réalité des différentes communautés acadiennes. Nous devons naviguer prudemment entre deux écueils, et nous tentons de le faire avec respect pour l’intelligence de nos lectrices et lecteurs. Valoriser une chose ne devrait jamais se faire en dénigrant autre chose, dans toutes situations. Merci et bonne continuité! 🙂
« …le personnel enseignant doit partir de cette réalité pour augmenter les connaissances linguistiques des jeunes de manière à ce qu’ils puissent s’exprimer dans un français correct et, par conséquent, diminuer leur insécurité linguistique. C’est ainsi que les enseignantes et les enseignants guident l’élève de façon à transcender cette insécurité pour se sentir plus en confiance et s’exprimer dans un français correct. »
Et voilà où j’ai un désaccord idéologique avec vous, madame Gaudet. Bien que j’aime savoir que vous êtes au courant des études sur l’insécurité linguistique, je comprend l’enjeu différemment. Ce n’est pas à travers de l’enseignement d’un « français correct » qu’on va finir par atténuer l’insécurité linguistique. Déjà en faisant la distinction entre un « français correct » et le chiac, le second devient nécessairement son opposé, soit une « français incorrect ». C’est possiblement pas ce que vous entendez faire comprendre, mais il reste que c’est la dichotomie que vous faites.
Tant qu’à moi, je le vois plutôt comme étant un enjeu du « Victim blaming » (le concept n’a malheureusement pas de traduction qui lui fait justice, donc pardonnez-moi pour cet utilisation de ce franglais que vous n’aimez point), où par la reproche (qui souvent pourrait être faite de manière plus empathique) sur le niveau de langue des jeunes, on est nécessairement en train de dire à un individu dans une position vulnérable que sa manière de comprendre et de s’exprimer est une manière qui devrait être découragé, donc dévalorisé, et l’imposition d’un français plus « correct » est souvent mal reçu.
Je comprend complètement le débat sur le développement de bonnes connaissances linguistiques, mais de croire que l’insécurité linguistique sera vaincu par l’enseignement d’un « français correct », c’est tout simplement mal comprendre la situation de la jeunesse francophone.
(PS: C’est vraiment pas cool d’avoir fait la comparaison avec les étudiants en éducation à l’Université de Moncton avec le test en français et une pauvre maîtrise de la langue. C’est déplorable de vous voir faire ce genre de fausse équivalence et de mal problématiser l’enjeu.)
Monsieur Boutin…dites-moi, comment vaincre l’insécurité linguistique d’une personne vivant en milieu minoritaire sans passer par l’apprentissage d’une langue qui lui permettra de se sentir à l’aise avec les « parlant français » outre-frontière? Ne pensez-vous pas que l’apprentissage d’une langue, ce n’est pas qu’à l’école de l’assurer, mais également à la communauté?
Je suis entièrement d’accord que la communauté partage la responsabilité avec l’école d’assurer l’apprentissage de la langue. Là où nos points de vue diffèrent, c’est au point de vue de la localité; Ce n’est pas simplement qu’à l’extérieur des « frontières » où on ressent l’insécurité linguistique, mais souvent au sein même de la communauté. C’est dans les interactions quotidiennes qu’ont lieu les micro-agressions qui mène au sentiment d’insécurité linguistique, soit avec les enseignants, les leaders communautaires, les parents. Une sécurité qui est ressenti dans sa communauté est une confiance qui va surgir quand on sort de sa communauté. C’est de la responsabilité à la communauté et à l’école d’assurer qu’il y ait une balance entre avoir de bonnes compétences en français et de pouvoir être right fier de nos régionalismes et appropriations du langage à notre image, en évitant la culpabilité, qui semble être difficile pour certains.
Vous avez raison de dire que c’est la responsabilité de la communauté à assurer une sécurité linguistique, parce qu’elle néglige de le faire depuis longtemps.
Merci M. Boutin. Je ne suis ni universitaire, ni chercheur en linguistique, mais je vois la complexité des méandres qui se créent dans l’espace mental des apprenants (jeunes ou moins jeunes) que les éducateurs ont la tâche de guider et de servir de modèle pour les jeunes au moment de leur apprentissage à la communication orale et écrite. C’est de là que je trouve important qu’un slogan comme celui qui se trouve à l’origine de ce débat soit de nature à transmette un message qui doit compléter tous les efforts faits à l’école et dans la communauté pour donner à l’enfant des outils d’expression au niveau de ses interactions verbales. Je ne crois pas qu’un slogan conçu dans le cadre de la langue française aurait augmenter l’insécurité linguistique dont parlent si bien Gaudet et Grenier, entre autres. Je ne crois pas non plus que les responsables du choix de ce slogan auraient brimé la fierté des jeunes qui participeront à ces Jeux s’ils avaient respecté la langue française commune à toutes les communautés de la Francophonie canadienne. Sans parler de l’image que projette ce slogan de Dieppe-Moncton ailleurs dans le pays.
Félicitations pour faire la distinction entre le chiac (bailler, quérir, hucher, gosier) et le franglais (résultat de l’assimilation)!
Ça rendrait le débat beaucoup plus intéressant si on pouvait s’accorder sur cest deux termes!