La sous-représentation des femmes dans les médias : un problème d’inégalité – Joëlle Martin

Si vous n’êtes pas convaincus que les femmes sont sous-représentées comme intervenantes dans les médias, prenez le journal de ce matin. Comptez le nombre d’hommes qui y apparaissent comparé au nombre de femmes, seulement sur la page couverture. Je fais l’exercice moi-mêmeau moment d’écrire l’article : le 10 octobre, sur la page couverture de notre quotidien francophone, L’Acadie Nouvelle, les deux manchettes et la une portent sur des hommes et sont accompagnées d’une photo. Rares sont les éditions où nous ne voyons que des femmes sur la page couverture de L’Acadie Nouvelle, alors que l’inverse se produit très souvent.

Bref, le Regroupement féministe du Nouveau-Brunswick a constaté dans son analyse publiée en 2011 que les femmes représentaient seulement 25 % des intervenants dans la presse écrite provinciale francophone durant les quatre semaines étudiées. Elles étaient sous-représentées par rapport à presque tous les sujets d’actualité, et ce, même dans les secteurs d’activité où elles sont en réalité majoritaires ou fortement présentes dans notre société, tels que la santé, l’éducation, le domaine communautaire et les arts et la culture.

Chez les journalistes

Cet été, j’ai eu la chance de faire une tournée pour rencontrer 40 journalistes francophones de partout dans la province et d’échanger sur la place des femmes dans les médias. Voici quelques constats que j’ai faits.

La plupart des journalistes que j’ai rencontrés sont d’accord pour dire que les médias sont un reflet de la société, et sont un espace où sont exposés les sujets d’intérêt public.

Plusieurs affirment que lorsque vient le temps d’écrire un article, les intervenants sont déterminés à l’avance par le sujet à couvrir. De cette opinion, nous pouvons conclure qu’il existe des intervenants plus pertinents que d’autres selon le sujet.

Les journalistes avec qui je me suis entretenue s’entendent aussi pour dire qu’il y a moins de femmes que d’hommes qui occupent des postes de porte-parole, ou de hauts dirigeants, donc par circonstance, dans leur travail, ils parlent plus souvent à des hommes qu’à des femmes.

Jusqu’à présent, les journalistes ont tout à fait raison.

Certains journalistes disent cependant qu’ils n’ont aucune responsabilité par rapport à la représentation des genres dans les médias. Que le choix des intervenants est hors de leur contrôle pour les raisons mentionnées plus haut.

 Joelle Martin femmes et médias

Chez les féministes

Plusieurs féministes croient que les journalistes détiennent une part de responsabilité pour assurer une représentation équitable des femmes et des hommes dans les médias. Que la diversité des sources et la représentativité hommes/femmes font partie des facteurs à considérer pour assurer la pertinence des sources choisies. En d’autres mots, selon cette opinion, pour peindre un portrait juste de la place publique, il faut avoir une diversité de sources et d’idées.

Si ce sont toujours les mêmes experts et les mêmes élus qui interviennent dans les médias, même s’ils sont réputés ou légitimes, cela peint un portrait biaisé de la place publique et cela provoque une situation où les mêmes opinions circulent de façon continue.

La représentation des femmes dans les médias reste, pour plusieurs féministes, une responsabilité partagée. Comme les médias sont exposés au même contexte social que nous, ils sont traditionnellement plus masculins. Fondamentalement, la sous-représentation des femmes dans les médias est un problème qui relève plus largement de l’inégalité entre les femmes et les hommes dans notre société.

Le problème est plus grand que nature et nous devons commencer quelque part pour atteindre une égalité réelle. Pour ma part, je crois que la meilleure représentation des femmes dans les médias ne peut qu’enrichir l’opinion publique et encourager d’autres femmes à prendre la parole. Vous connaissez l’effet boule de neige?

Pour apporter la réflexion plus loin

Il n’est certainement pas possible de faire le tour de la question en 800 mots; voilà pourquoi les échanges se sont poursuivis autour d’une table ronde qui a certainement fait réfléchir sur la question. Louise Imbeault (ancienne directrice de Radio-Canada Acadie), Pascal Raiche-Nogue (président de l’Association acadienne des journalistes) et Sarah Leblanc (directrice générale du Regroupement féministe du Nouveau-Brunswick) ont donné leurs points de vue sur la question sous la supervision du médiateur Abbé Lanteigne (professeur à l’Université de Moncton). L’intégrale de la table ronde se trouvera bientôt sur les réseaux sociaux.

L’objectif n’est pas d’essayer de trouver des coupables, mais bien d’engendrer une prise de conscience par rapport au fait que dans une société de plus en plus égalitaire, les femmes (qui constituent 51 % de la population du Nouveau-Brunswick) sont encore sous-représentées dans l’espace public. Et selon moi, c’est problématique.

À propos…

joelle martinJoëlle Martin est diplômée de la maitrise en administration publique de l’Université de Moncton et du programme d’Information-communication de la même institution. Elle travaille présentement au Regroupement féministe du Nouveau-Brunswick comme agente du projet Femmes et médias en Acadie.

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2 réponses à “La sous-représentation des femmes dans les médias : un problème d’inégalité – Joëlle Martin

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